En Belgique, un enfant sur cinq vit dans la pauvreté (chiffres avant la Covid-19).  Pour un pays riche comme le nôtre, ce chiffre est très élevé. Grandir dans la pauvreté impacte tous les droits des enfants et réduit leurs perspectives. 

Ceci est clairement visible dans le domaine de l'éducation. En effet, les systèmes éducatifs en Belgique sont très inégalitaires et coûteux pour les familles. Les résultats scolaires sont fortement déterminés par le milieu social d’origine. Pourtant, les familles vivant dans la pauvreté sont bien conscientes de l'impact d'une bonne éducation et de la scolarité sur la vie de leurs enfants. Elles espèrent que l'éducation donnera à leurs enfants un meilleur avenir, mais elles sont vite déçues. Dans les murs de l'école, les inégalités sociales se transforment en inégalités scolaires.

De plus, avec la crise sanitaire et les inondations du mois de juillet dernier, les inégalités scolaires se sont encore aggravées (logements exigus pour les familles pauvres rendant l’étude complexe, problèmes de connexion, absences de matériel informatique, existence de tensions intrafamiliales liées aux conditions de vie,…). De plus, le stress permanent qui accompagne la vie dans la pauvreté peut aussi empêcher un enfant de se concentrer sur ses études. Les conséquences sont donc importantes : les enfants vivant dans la pauvreté sont beaucoup plus susceptibles d’accumuler du retard durant leur scolarité (processus de décrochage et de relégation : non-obtention du CEB, orientation vers l’enseignement spécialisé, décrochage scolaire ,…), de quitter l’école prématurément et donc de ne pas obtenir de diplôme. Force est d’ailleurs de constater que dans l’enseignement supérieur et universitaire, les enfants de familles pauvres sont sous-représentés.  

Il existe toutefois des solutions pour combattre les inégalités en matière d'éducation, et ce notamment en veillant d’emblée à une rencontre réussie entre les familles et l’école. Lors de la visite de la Reine Mathilde de ce jour, une pratique positive de l’association bruxelloise “Vrienden van het Huizeke”, était ainsi au centre de l’échange : les “brugfiguren” Il s’agit d’un tandem composé d'une personne qui a l’expertise de la vie dans la pauvreté et d'un.e travailleur.euse social.e. Ils vont à la rencontre des familles vulnérables là où elles sont le plus facilement accessibles à savoir à la porte de l'école quand elles amènent ou viennent chercher leurs enfants. C’est un lieu de contact essentiel pour rencontrer les familles. Les « brugfiguren » tentent d’emblée de créer un lien entre l’école et ces parents, et cherchent à les soutenir afin qu’eux et leurs enfants aient une opportunité de sortir de la pauvreté grâce à l'école. De même, les “brugfiguren” veillent aussi à leur faciliter un meilleur accès à leurs droits (accompagnement, explications sur les droits sociaux, les services, etc.).  Au cours du dialogue avec la Reine Mathilde, deux mères et un jeune racontent comment les “brugfiguren” les ont aidés.  

Une mère ayant bénéficié du projet “Brugfiguren” témoigne : “Quand on est dans la difficulté et qu’on a l’impression que toutes les portes sont fermées, avoir quelqu’un qui vous sourit pour vous aider, c’est un soulagement. Ouf, je ne suis plus seule, je peux partager mes difficultés, mon stress, mes angoisses et essayer d’épanouir mes enfants.{...} C’est un accompagnement durable et très proche.”

 

Lors de la rencontre avec la Reine, deux mères et une jeune fille de 13 ans venant de Wallonie et une mère de Flandre ont également pris la parole.

Elles ont témoigné que pour lutter contre les difficultés et le stress permanent causés par la pauvreté, il est essentiel pour les personnes vivant dans la pauvreté de se retrouver entre elles et avec des associations. Les stigmatisations et les préjugés peuvent empêcher les individus de chercher de l’aide : “L’accueil est parfois rude dans certains services et à l’école. C’est difficile alors d’oser faire une demande”. Cela impacte aussi les enfants :

“Les a priori commencent très tôt et ils influencent la trajectoire de ton enfant au sein de l’école.”
 A l'issue de la réunion, la Reine Mathilde conclut : « Même dans les pays les plus favorisés, comme le nôtre, la crise du COVID n’a fait qu’accentuer la fracture sociale et les enfants ne sont pas épargnés. Le nombre d’enfants et de familles qui vivent en situation de précarité reste encore trop élevé. Nous avons besoin d’un nouvel élan et de solutions durables pour lutter contre la pauvreté des enfants ».

UNICEF Belgique et les réseaux régionaux de lutte contre la pauvreté au sein de BAPN souhaitent rappeler la nécessité d'une politique structurelle de lutte contre la pauvreté, également en matière d'éducation. Des pratiques positives, telles que les "brugfiguren", nous montrent concrètement qu'il est possible de s'attaquer à la pauvreté et à l'exclusion dès le plus jeune âge. Cependant, le soutien politique à long terme et les investissements nécessaires font souvent défaut. Le 6 décembre, nous ne demandons pas aux politicien.ne.s des cadeaux pour les enfants et leurs familles mais de faire preuve de courage politique. Il faut investir dans des mesures dont nous savons qu'elles seront efficaces : soutenir des projets comme les “brugfiguren”, y compris dans la Fédé     ration Wallonie-Bruxelles, se concentrer sur la coopération renforcée entre les parents et les écoles et diminuer les pressions financières que les parents subissent quotidiennement.